La PNL pour pousser les murs

La PNL pour pousser les murs

Cet article a été rédigé pour le magazine Métaphores n°97 de juin 2020, le journal des adhérents de NLPNL, Fédération des associations francophones de certifiés en programmation neurolinguistique.

PENDANT PRÈS DE DEUX MOIS, LA MAJORITÉ DES FRANÇAIS A ÉTÉ CONFINÉE À DOMICILE POUR ENRAYER LA PANDÉMIE DE COVID19 QUI A DÉFRAYÉ LA CHRONIQUE À L’ÉCHELLE DU GLOBE. SI CERTAINS ONT CONTINUÉ À TRAVAILLER, QUITTANT LEUR DOMICILE ET S’EXPOSANT AU VIRUS, TOUS LES CITOYENS ONT DÛ APPRENDRE D’UNE FAÇON OU D’UNE AUTRE À « NAVIGUER ENTRE LES TORRENTS », POUR REPRENDRE L’EXPRESSION DE BORIS CYRULNIK, AUTREMENT DIT À DÉVELOPPER LEUR RÉSILIENCE

L’homme aura connu en ce début d’année 2020 un scénario digne d’un film de science-fiction, tant dans le déroulé et la nature des événements que dans l’essor de nouvelles habitudes réduisant son quotient tactile et contribuant à créer une fission entre un monde d’avant – synonyme de liberté, de proximité – et un monde d’après, que beaucoup associent au contrôle, à la distanciation et au dénuement. Nombre d’entre nous pourtant prennent le parti de ne pas dissocier deux mondes mais de continuer à conceptualiser le monde dans son unité, une unité évolutive qui implique l’adaptabilité des espèces qui l’habitent. D’ailleurs, puisque l’évolutionnisme darwinien parcourt toutes les bouches à chaque épreuve que la nature impose à l’homme, expliquant la transformation adaptative des espèces, il est utile de rappeler qu’au vu des statistiques de mortalité mondiale et de notre réponse à la menace, le nouveau virus ne fait pas tant s’adapter le système immunitaire humain que son système de cohabitation et son réseau d’information. Dès lors, et toujours dans l’optique d’une évolution adaptative, l’adoption de nouveaux systèmes de pensée paraît pertinente.

L’injonction qui corrompt

Avec les nombreux outils de développement personnel et de connaissance de soi qui sont connus à ce jour, on aurait pu s’attendre à ce que nous soyons incités à largement les employer pour faire cheminer notre pensée entre les nids-de-poule métaphysiques alarmistes – que l’alarmisme soit justifié ou non – afin d’accepter de se trouver face à soi et de transformer ses croyances limitantes, en tirant le meilleur parti de la mise à pied. Je ne sais pas pour vous mais à aucun moment, je n’ai entendu les médias faire l’apologie de la sophrologie, de la PNL, de l’ennéagramme, de l’auto-hypnose, du reiki, de l’intention positive ou de tout autre outil accessible individuellement ou par l’entremise d’un praticien via la visioconférence.

Certes, l’information anxiogène est prête-à-consommer, elle fait vendre et fidélise ! Consulter un psychologue à distance ou pratiquer le yoga dans son salon ont presque attiré toute la lumière des projecteurs des plateaux de télé vidés de leurs équipes techniques. Et pour cause, afin de pallier la naturelle angoisse du vide de l’homme, nous étions incités à conduire pléthore d’activités, seul, à distance ou avec ses enfants pour ne pas s’ennuyer et surtout pour mettre ce temps “à profit”, le profit résidant ici dans le remplissage ou plutôt dans la “productivité”, déjà chère à notre société prônant le faire plutôt que l’être lorsqu’elle carbure à plein régime. Ou comment corrompre la solution au problème corrompu. Car vouloir rester productif mais s’autoriser à l’inertie, accuser le coup mais espérer, tenter de ne pas paniquer mais s’inquiéter suffisamment pour les autres, c’est un peu comme vouloir faire entrer un carré dans un rond. D’une certaine façon, si la détente était de mise, le conseil portait toujours l’individu à l’extérieur de soi. Alors que les conditions étaient idéales pour qu’il voyage en soi.

L’écueil de croissance

Parce qu’il imposait un état sédentaire et une frustration psychologique associée, le confinement nous renvoyait à un écueil de croissance : ce qui s’est vérifié en économie se vérifie également sur le plan intellectuel et psychologique. L’esprit, au même titre que le porte-monnaie, se trouve ralenti, car moins sollicité et frileux, car incertain. Dès lors, la programmation neuro-linguistique pouvait être un allié et l’est toujours à l’heure du déconfinement. Après tout, nous ne pouvons être certains que d’une chose : soi-même.

La technique de l’ancrage est plus qu’utile pour faire face aux sentiments d’inconfort et d’impuissance, en associant un geste ou une image à un souvenir lié au dépassement d’une difficulté, autrement dit une confirmation d’être capable de veiller à son propre bien-être, d’être suffisamment calibré pour absorber puis traiter avec bon sens des informations anxiogènes. Je pense également à un ami ayant non seulement redécouvert la joie de jouer avec ses enfants en utilisant des petites voitures mais ayant aussi résolu la tendance qu’il rencontrait à se sentir être “le parent méchant, celui qui empêche”. Il était question d’expliquer à l’enfant, en donnant à chaque jouet l’identité d’un membre de la famille, pourquoi il était impossible de visiter grand-mère. Au fur et à mesure des scénarios partagés et de l’attribution de la responsabilité à un tiers pour le problème évoqué, l’ami a pu mieux comprendre la source de sa propre souffrance. Je lui ai donc suggéré de recréer d’autres scènes, relatives à sa propre enfance ou à son statut parental, des scènes correctrices (faites en conscience) et non plus seulement explicatives, pour s’éloigner du rôle prétendument endossé. Une autre amie, à court d’idées pour divertir son enfant, s’est laissée aller à inventer et narrer une série d’histoires au point que son conjoint veuille les entendre à son tour. Divertir son enfant la rassurait, elle, car les héros de son épopée trouvaient bien entendu des réponses aux obstacles et questionnements qu’elle ne trouvait pas dans son propre quotidien. Chaque fois, elle transformait son inquiétude en quiétude même si les réponses imaginées n’étaient pas toujours adaptées à la vie d’une mère, épouse et salariée confinée en 2020. La libération psychologique qui suivait lui permit même de s’épanouir un peu mieux dans la communication avec son époux, car la parole était fluide. Se rendait-elle seulement compte qu’elle utilisait la vie du héros ?

Même lorsque l’on est formé à déconstruire les mécaniques automatiques comportementales, le système nerveux adore ce qu’il connaît ! En situation nouvelle d’urgence, d’angoisse et d’inconnu, le cerveau a tôt fait de se créer de nouveaux chemins de pensées tout-tracés-vers- l’inhibition comme j’aime à les appeler, en ayant expérimenté de très nombreux. La particularité du confinement est qu’il réunit les trois critères de situation-à-crainte. Le virus est nouveau et notre réponse à la menace l’est d’autant plus. Le confinement comme l’assimilation de ce qui se passait dans le monde, s’est fait dans l’urgence ou plutôt, j’ose le dire, a été forcé et jumelé à la pensée elle aussi forcée, que quelque chose, choisi par quelqu’un d’autre que nous-mêmes, pour nous-mêmes, était ce qu’il y a de mieux pour nous. En deux temps trois décrets, nous avons été dépossédés du droit de juger ce qui était bon pour notre corps, notre esprit, notre entourage et notre environnement par le devoir de veiller au bien commun, ravalant au passage notre intuition. Enfin, rien ne pouvant prédire l’issue ou l’évolution de la situation, l’individu est en perte de repères et ne peut, pour éviter de chanceler, que se maintenir sur le seul repère fiable : soi-même.

Une voie d’enrichissement

Enfin, et ce dernier élément n’est pas des moindres, le temps passé à l’arrêt est propice à l’identification d’un plafond de verre (celui de notre zone de confort). Pour ceux qui ne sont pas encore au fait de leur structure comportementale acquise ou qui ne s’emploient pas à la retravailler, le confinement aura pu leur laisser en entrevoir les limites. Une réponse réactive fondée sur l’expérience subjective connue du sujet (une sorte de comportement copier-coller qui se trouve molesté lors d’un challenge par exemple) n’aura donc pas pu être applicable, le sujet n’ayant pas encore expérimenté d’épreuve semblable. Mais observons les personnes qui ont vécu la guerre des décennies plus tôt: bien que plus fragiles, elles délivraient généralement des témoignages plus engageants, exhortant à la résilience, à la prise de recul et à la confiance en soi. Ainsi, si ce n’est pas l’identification d’une structure comportementale limitante qui ressort du confinement pour le sujet, c’est l’identification d’un contexte nouveau qui, lui, va faire appel par extension à une nouvelle réponse comportementale… que le sujet aura tout le loisir de (re)créer !

Fable

Si l’on reste cartésien, il peut être utile de lister les épidémies que l’on a traversées et les dangers d’autres natures affrontés, acceptés avant de clore la liste par la phrase “je suis en vie”. Quel que soit votre âge, la liste est longue et il se pourrait bien que vous ne voyiez plus l’utilité de la rendre exhaustive après une dizaine de tirets ! Selon le poète et dramaturge français Jean-Pierre Siméon, “la poésie sauvera le monde” et puisqu’il y aurait presque là de quoi établir une fable que les enfants apprendraient à l’école en guise de récitation, une fable qui porterait en elle le poids de l’attente envers un retour à l’insouciance, je ne résiste pas à l’envie de créer une courte composition pour les lecteurs de Métaphore :

À l’école, ils ne vont plus en rang par deux,

Mais en gardant leurs distances c’est heureux.
Deux petites mains
D’un seul crayon s’amusent
Espérant que demain
La nouvelle se diffuse :
Un vaccin salvateur contre le virus
Permettra désormais sans peur de prendre le bus.
Bas les masques !
Voici venue la mort de cette ère bien fantasque.